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Hamed Savadogo (Président de la jeunesse burkinabè en Côte d’Ivoire) : « La paix ne doit pas être un slogan, mais un engagement concret.»

Président de la jeunesse burkinabè en Côte d’Ivoire et porte-parole de la jeunesse CEDEAO, Hamed Savadogo s’exprime avec gravité et lucidité sur les enjeux de paix, de solidarité et de responsabilité collective dans un contexte régional sous tension. Figure engagée du dialogue intercommunautaire, il porte une voix à la fois ferme et fédératrice. Dans cet entretien, il revient sur l’importance de la mémoire collective, la place des jeunes dans la stabilité sous-régionale, la solidarité face aux crises humanitaires, et répond sans détour à une question souvent posée : son silence apparent sur son pays d’origine, le Burkina Faso.

Monsieur Savadogo, vous avez récemment lancé un appel fort aux acteurs politiques, en évoquant l’année 2010. Pourquoi est-il essentiel de raviver cette mémoire collective aujourd’hui ?

Hamed Savadogo : Parce que l’histoire n’est pas là pour être oubliée, elle est là pour nous enseigner. Ce que la Côte d’Ivoire a vécu en 2010 a laissé des cicatrices profondes. Des familles ont été brisées, des vies perdues, et une nation tout entière secouée. Aujourd’hui, alors que nous avançons vers de nouvelles échéances électorales, il est de notre devoir de tirer des leçons de ce passé pour éviter de retomber dans les mêmes travers. Se souvenir, c’est déjà poser un acte de responsabilité.

Vous parlez de faire taire les égos et de poser des actes forts pour préserver la paix. Quels gestes concrets attendez-vous des responsables politiques à ce tournant ?

Hamed Savadogo : Ce que nous attendons, c’est du courage. Le courage de dialoguer sincèrement, d’écouter l’autre, même quand il pense différemment. Le courage de privilégier l’intérêt du peuple à ses ambitions personnelles. Il ne suffit pas de parler de paix, il faut la bâtir, chaque jour, à travers des décisions responsables, des discours apaisants et des actes symboliques qui montrent qu’on met la nation au-dessus de tout. C’est là qu’on reconnaît les véritables leaders.

La jeunesse de la CEDEAO est au cœur de vos préoccupations. Quel rôle doit-elle jouer dans la consolidation de la paix et du vivre-ensemble en période de tension ?

Hamed Savadogo : La jeunesse ne doit pas être un outil manipulé, mais une force mobilisée pour la stabilité. Nous devons être des bâtisseurs, pas des braises. Chaque mot, chaque post sur les réseaux sociaux, chaque action peut apaiser ou attiser. J’appelle mes frères et sœurs de la CEDEAO à faire preuve de discernement, de retenue et de fraternité. À notre âge, on doit construire des ponts, pas des murs. On a trop à perdre à choisir la division.

Vous avez également exprimé un message de solidarité à l’égard des victimes des inondations en Côte d’Ivoire. Comment la diaspora burkinabè se mobilise-t-elle concrètement face à cette tragédie ?

Hamed Savadogo : Face à une telle détresse, rester silencieux serait inhumain. Nous avons spontanément organisé des chaînes de solidarité : dons alimentaires, vêtements, hébergement temporaire pour les familles sinistrées. Nos associations sur le terrain sont actives, et nous appelons chacun à contribuer, à son niveau. Ce n’est pas une affaire de nationalité, c’est une affaire de cœur. Quand une partie de notre communauté souffre, c’est toute notre humanité qui est interpellée.

Dans un contexte où la sous-région est souvent secouée par des crises, quel message d’unité souhaitez-vous adresser aux communautés ouest-africaines ?

Hamed Savadogo : Mon message est simple : restons unis. Nos frontières sont politiques, mais nos douleurs, nos joies, nos rêves sont les mêmes. La CEDEAO, ce n’est pas juste une institution, c’est une famille. On ne peut pas avancer les uns contre les autres. C’est dans la fraternité, dans la solidarité et dans le respect mutuel que notre avenir commun sera solide. N’attendons pas que le chaos parle pour nous. Soyons ces voix qui préviennent, qui consolent, qui construisent.

Pourquoi ne parlez-vous pas plus du Burkina Faso, votre pays d’origine, dans vos prises de parole publiques ?

Hamed Savadogo : C’est une interrogation légitime, et je tiens à y répondre avec sincérité.

Le Burkina Faso traverse une crise d’une intensité dramatique. Un conflit sans précédent déchire notre pays, bouleverse des familles entières, déracine des millions de personnes, et plonge la nation dans une douleur et une incertitude profondes. Dans un tel contexte, parler du Burkina ne peut se faire à la légère. Cela demande de la retenue, du respect, et parfois, un silence chargé de sens.

Mon engagement aujourd’hui s’enracine en Côte d’Ivoire, cette terre d’accueil qui abrite plus de 7 millions de mes compatriotes. C’est ici que je me tiens, en tant que porte-voix du vivre-ensemble, de la paix, et de la fraternité entre les peuples. Et c’est ici que je défends chaque jour la dignité des Burkinabè, sans forcément avoir besoin de brandir notre drapeau à chaque phrase. Car protéger la paix ici, favoriser la cohésion entre les communautés, c’est aussi contribuer indirectement à contenir l’expansion des violences, à restreindre l’influence du terrorisme dans la sous-région. Et donc, c’est agir pour le Burkina Faso, même sans le dire.

Parler à tous, ce n’est pas s’oublier. C’est élargir le cercle. Mon combat est régional, mais il reste profondément burkinabè. Chaque acte posé en faveur de la solidarité et de l’unité résonne aussi pour mon pays d’origine, pour ses fils, ses filles, son avenir.

Alors non, le Burkina Faso n’est jamais absent. Il est là, dans mes valeurs, dans ma manière de servir, dans mes silences aussi. Il est là, même quand je ne le nomme pas.

La rédaction

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