Sénégal: Ousmane Sonko s’en prend à Bassirou Diomaye Faye dans un discours
Le 10 juillet, lors de l’installation du Conseil national du Pastef, le Premier ministre Ousmane Sonko a tenu un discours virulent, pointant un “problème d’autorité” au Sénégal. Cette sortie cible implicitement le président Bassirou Diomaye Faye, son allié politique devenu chef de l’État.
Ousmane Sonko critique l’absence d’autorité de la présidence
Lors de cet événement marquant pour le parti Pastef, Ousmane Sonko a déclaré qu’il n’existe pas de problème majeur au Sénégal, à l’exception d’un « problème d’autorité », voire d’« absence d’autorité ». Une critique à peine voilée envers le président Bassirou Diomaye Faye, accusé de ne pas suffisamment soutenir son Premier ministre face aux attaques personnelles et médiatiques. « On ne peut tolérer qu’un homme, père de famille et chef d’institution, soit traîné quotidiennement dans la boue sous couvert de liberté d’expression », a martelé Sonko, appelant le président à « s’opposer fermement » à ces attaques.
Sonko demande à gouverner librement : tensions au sommet de l’État
Dans ce même discours, Ousmane Sonko réclame une véritable liberté d’action pour gouverner et mettre en œuvre les réformes promises par le tandem Sonko-Faye. Il en appelle à une clarification : « J’interpelle le président Bassirou Diomaye Faye pour qu’il prenne ses responsabilités, sinon qu’il me laisse faire », a-t-il averti. Ce ton direct révèle des divergences croissantes au sein de l’exécutif sénégalais, nourrissant les spéculations d’une crise institutionnelle. Le journal L’Enquête a même titré : « Divorce en live », soulignant la gravité perçue de la situation.
Analyse politique : une relation de pouvoir inversée ?
Pour le politologue Moussa Diaw, ces divergences à la tête du pays sont significatives, mais pas surprenantes. Maurice Soundeck Dione, professeur en sciences politiques à Saint-Louis, souligne la nature particulière de ce duo exécutif. « C’est Sonko qui a proposé et soutenu la candidature de Diomaye Faye. Tout se passe donc comme si le Premier ministre était le mentor du président, alors que constitutionnellement, c’est le président qui dirige le Premier ministre. » Cette configuration inédite dans l’histoire politique sénégalaise semble aujourd’hui atteindre ses limites.
Un discours perçu comme dangereux par les observateurs
Demba Gueye, enseignant-chercheur en sciences politiques, juge sévèrement la sortie du Premier ministre : « Il s’agit d’un discours dangereux, car il fragilise l’institution présidentielle. Ousmane Sonko ne s’en prend pas seulement au président, mais aussi à d’autres institutions comme la justice ou les médias. » Dans un pays à fort régime présidentiel, voir un Premier ministre critiquer ouvertement son président est presque sans précédent.
Quelle issue pour le duo Sonko-Faye ?
Malgré les tensions, Ousmane Sonko affirme ne pas vouloir démissionner. De son côté, une source proche de la présidence relativise cette crise, évoquant la frustration d’un Premier ministre bridé dans ses fonctions. La question centrale reste : comment Bassirou Diomaye Faye va-t-il réagir ? Va-t-il affirmer son autorité en limogeant Sonko, ou cherchera-t-il à préserver l’unité gouvernementale ?
